Entretien avec le Maire de Santo André, M. Carlos Grana
Le Maire de Santo André (Brésil), M. Carlos Grana, défend dans un entretien avec l’Association qu’en unissant les efforts autour de l’idéal partagé de la Ville Educatrice, nous faisons un grand pas vers une société chaque fois plus démocratique. Vous pouvez consulter l’entretien ci-joint.
Qu’apporte à Santo André son adhésion à l’AIVE et que peut apporter votre ville à l’Association ?
Le monde doit faire face de nos jours à un ensemble de problèmes nouveaux nécessitant de nouvelles réponses qu’il est impossible de trouver quand on regarde la ville d’un unique point de vue. La ville doit être le résultat d’un effort éducatif conjoint.
Nous tous et toutes dans une ville avons le devoir et le pouvoir de lutter pour un environnement éducatif émancipateur, qui corrige les inégalités et respecte les différences ainsi que l’environnement.
C’est un honneur pour nous de faire partie de l’AIVE en tant que membre du Comité exécutif et de tracer conjointement avec d’autres villes du monde des politiques publiques dans la perspective d’une société plus humaine et plus juste à partir d’actions locales.
Coordonner le Réseau Brésilien représente pour nous un défi et une responsabilité pour sensibiliser et articuler une plus grande quantité de municipalités, afin que les idéaux de la Charte se convertissent en engagements des villes brésiliennes. En unissant les efforts et les buts autour de cet idéal partagé, je sais que nous faisons un grand pas vers une société démocratique, avec les bras ouverts pour accueillir des centaines d’autres villes.
Santo André est en cours de construction en interne de cette pratique et elle fera tout son possible afin que beaucoup d’autres municipalités brésiliennes continuent dans la même voie. La Rencontre des Villes éducatrices des 3 et 4 novembre derniers en est une preuve. Cette rencontre a réuni presque un millier de personnes pour débattre des directrices à suivre pour renforcer et diffuser les principes des Villes éducatrices dans toutes leurs actions, aussi bien celles qui sont entreprises par les gouvernements locaux que celles de la société civile.
Pouvez-vous nous donner quelques exemples du dialogue qui est établi avec la société civile ?
Santo André a adopté une politique de gestion publique participative, qui inclut la réalisation de conférences, d’audiences publiques et de forums. Ceux-ci rendent possible un large débat ainsi que la délibération autour des politiques publiques ; des consultations et des réunions d’information, qui établissent un lien entre les différents secteurs de la mairie et la population ; l’organisation de 18 Conseils municipaux de participation citoyenne, et parmi eux les Conseils municipaux de la Santé et de l’Éducation, et le budget participatif.
En ce qui concerne la planification du budget, en 2013 pour la première fois, le Plan pluriannuel (PPA) a été élaboré de manière participative. Cette action a permis un large débat ainsi que la délibération autour de la planification à moyen terme, c’est-à-dire pour une durée de quatre ans. En 2014, on a exécuté le budget participatif afin de détailler les budgets 2015 et 2016, sur la base du PPA.
Cela a constitué un grand progrès, dans la mesure où la population a pu voter les actions du budget annuel dans son district et dans sa ville, à partir des directrices à moyen terme qui ont été élaborées au préalable de manière conjointe avec les pouvoirs publics. D’autre part, ce qui est nouveau dans le budget participatif, c’est que, en plus du débat présentiel organisé au moyen de séances plénières au sein des différents districts de la ville, on a augmenté et diversifié le public participant au travers du budget participatif digital et du budget infantile.
Pouvez-vous nous expliquer l’initiative « PrefeiturAqui » et comment vous parvenez à générer l’intérêt pour le public ?
L’initiative « PrefeiturAqui » est menée à terme dans chacune des 20 districts du budget participatif de Santo André, par une équipe composée de fonctionnaires de divers secteurs. Cette initiative est développée pendant 30 jours dans un territoire déterminé. Les actions qui sont réalisées pendant cette période sont d’entretien et d’amélioration de l’espace urbain, de diffusion des informations quant aux services publics et de promotion du soin de la ville. C’est ce dernier aspect que nous appelons action éducative. Toutes les actions sont déterminées en fonction d’un diagnostic préalable de la région réalisé par les divers secteurs faisant partie du programme. Organisé de cette manière, le programme mène à un même territoire et en même temps à un ensemble de services ; méthodologie de travail qui permet aussi de perfectionner et d’optimiser la durée et les ressources humaines et financières.
L’action éducative de l’initiative se divise en deux formes d’action :
– les visites, qui sont effectuées pendant la période d’entretien et d’amélioration urbaine du territoire au travers du dialogue avec la population et de la distribution de matériel de formation pour les commerces et les organismes ; et
– l’action éducative conjointe, un événement qui réunit la population du district à la fin du processus avec l’objectif de rendre visibles les modifications dans le territoire et les actions de formation réalisées découlant d’un diagnostic préalable.
Un des faits qui participe de la mobilisation autour de l’action éducative est son association avec les actions d’entretien de la ville, comme la taille des arbres et le nettoyage des points irréguliers de dépôt d’ordures. De ce point de vue, en même temps que l’on retire les ordures accumulées dans les lieux impropres, la population apprend à veiller à ce que ce type de problème ne se reproduise plus. Un autre facteur important est le dialogue direct et la convivance établie avec la population grâce, notamment, à la présence de l’équipe de la mairie pendant tout le temps que dure le programme dans le territoire.
Quel est le rôle des conseillers locaux de la Santé et quels avantages apporte cette figure à la gestion locale ?
En plus du Conseil municipal de la Santé, Santo André dispose de 54 Conseils locaux de la Santé, ce qui permet un contrôle social effectif et renforce la participation démocratique de la population à la création et à l’application des politiques publiques.
Les conseillers sont élus par vote direct de la population résidente de la zone d’action de l’unité de santé, ce qui implique une large compréhension de la participation démocratique aux décisions de la municipalité dans toutes ses actions, y compris la santé. Ce dialogue permet à la gestion publique municipale d’interagir avec les nécessités réelles de la population, de manière territoriale, répondant ainsi aux souhaits des communautés locales en travaillant de manière précise. Les Conseils visent les possibles échecs et solutions dans l’attention, orientent la population dans le fonctionnement des services, stimulent la participation organisée dans le territoire des travailleurs et des gestionnaires des services, en recherchant l’amélioration des services prêtés dans le domaine de l’unité de santé et de toute la ville.
La ville offre d’innombrables opportunités éducatives et ressources pédagogiques. Pouvez-vous nous en donner quelques exemples ?
En plus des ressources pédagogiques et technologiques qui composent l’acquis des écoles, comme les livres, les jeux, les ordinateurs, le Réseau municipal de l’Éducation dispose de nombreuses propositions dans la ville, comme le Sabina – Parc de la Connaissance, le Parc École ou les CESAS. Tous ces équipements éducatifs sont aussi ouverts à la population.
Le Sabina est un des principaux centres de sciences interactif d’éducation contemporaine de l’État de São Paulo. Il a pour mission d’être un grand laboratoire pour les écoles dans les domaines de la physique, de la chimie et de la biologie. Il dispose de nombreux équipements, activités d’expérimentation et expositions temporaires ; par ailleurs, l’espace inclut aussi un atelier de musique, une bibliothèque, un auditorium ainsi que diverses salles.
Parmi les attractions les plus appréciées des élèves, garçons et filles, se trouvent les dinosaures, le squelette du Tyrannosaurus rex, d’une longueur de 12,80 mètres — la seule réplique en Amérique latine —, et un Ceratosaurus robot qui se meut et émet des sons. Le groupe de pingouins de Magellan est une attraction à part, principalement après avoir reçu, à la fin de 2013, la première couvée née dans le Sabina. Une autre activité très appréciée est la nef simulatrice, qui offre aux visiteurs la sensation de survoler Santo André jusqu’au littoral de São Paulo, en terminant la « promenade » par un plongeon dans le fond de la mer pour y voir les habitants de la zone marine préservée, connue sous le nom de Laje de Santos. En outre, un autre simulateur, appelé Furie de la nature offre aux visiteurs le contact avec des phénomènes tels que les ouragans, les éruptions volcaniques et les tremblements de terre, au travers d’une plateforme mobile sûre. Enfin, le Sabina dispose aussi de 150 activités d’expérimentation, incluant le fameux générateur de Van De Graaff, le planétarium et le théâtre digital Johannes Kepler le plus moderne du Brésil.
Le projet Parc École a commencé en 1997. Il vise à offrir une éducation inclusive qui emphatise l’environnement comme une des principales ressources du processus de construction de la connaissance. Jusqu’à présent, l’objectif de cet espace a été de sensibiliser les enfants, garçons et filles, les enseignants/tes, les directeurs/trices et les fonctionnaires du réseau municipal aux questions environnementales et de sciences naturelles, en stimulant aussi la participation des écoles, des parents d’élèves et de la communauté dans son ensemble. Ses 50 000 m2 offrent des ressources pédagogiques pour éveiller et stimuler la curiosité sur le thème environnemental, la botanique, l’art et le recyclage des matériaux, ainsi que la prise de conscience sociale au travers de pratiques éducatives. Une grande partie des zones du Parc École sont construites avec des matériaux recyclés mettant à profit les ressources naturelles. Le Parc École offre, dans son agenda mensuel, des cours, sous forme d’ateliers, de conférences et d’expositions. En plus de tout cela, il dispose d’espaces pour les spectacles théâtraux, les expositions de photographies et d’art plastique, d’un gymnase à l’air libre et d’un espace arborisé pour se promener.
Les CESAS sont des complexes éducatifs qui incluent une crèche, une école municipale maternelle et primaire, un centre communautaire et une bibliothèque. En outre, ils offrent aux élèves, aux familles et à la communauté locale des espaces agréables avec une piste piétonne, une aire de convivance, une piscine et une zone poly-sportive, où l’on peut réaliser des activités sportives, culturelles et ludiques.
La Mairie de Santo André est responsable des enseignements maternel et primaire. Quelle est l’importance de la formation continue des professionnels de l’enseignement dans les résultats qu’obtiennent les élèves dans cette étape ?
La formation des enseignants est conçue par ce gouvernement comme l’opportunité de capacitation qui est offerte aux éducateurs du réseau public municipal pour augmenter leurs compétences professionnelles et acquérir des contenus théoriques qui leur permettent de consolider une éducation libératrice et critique dans la pratique.
Nous considérons qu’un professeur qui réfléchit, qui génère des connaissances, améliore son enseignement en planifiant et en structurant le quotidien pour rendre plus agréable le processus d’enseignement/apprentissage pour les élèves, en vue de leur développement intégral. Du fait qu’il a un accès constant aux connaissances historiquement accumulées et aux progrès dans le domaine social et scientifique, il amplifie son domaine d’action enseignante, ce qui se répercute sur la croissance des élèves.
Ce processus requiert des professionnels de l’enseignement dûment préparés pour travailler avec un profil d’élève du XXIe siècle, c’est-à-dire avec des besoins particuliers et face à de nouveaux défis sociaux, culturels et affectifs. Ces nouvelles nécessités exigent des enseignants la capacité de comprendre, de prévoir et d’agir au sein de la société moderne, en éduquant de telle manière que l’acte d’apprendre soit mis en valeur.
Par conséquent, l’actualisation, dans tous les domaines de la connaissance humaine qu’implique l’action pédagogique, est indispensable.
C’est dans la mise en valeur des enseignants, dans leur autoréalisation professionnelle, que les professeurs sont stimulés dans l’acte d’enseigner, dans la création d’ambiances qui permettent aux élèves de croire en leurs compétences et leurs capacités cognitives et affectives, au moyen de la création ou de l’application de techniques innovatrices, en partageant leurs savoirs avec les élèves et leurs familles, dans une chaîne ininterrompue d’apprentissage.
Nous pouvons affirmer que les enseignants de notre réseau d’éducation, puisqu’ils ont accès à une formation continue de qualité, ont l’opportunité de se développer personnellement, d’améliorer leur capacité critique et de favoriser le développement de leurs élèves, au travers d’un processus dialogique qui permettra, en partant de la compréhension du monde, de réfléchir sur la réalité et d’agir de manière engagée pour la construction d’un avenir différent. Parallèlement, ce processus stimule chez les élèves la confiance en leurs propres capacités de création, de construction et de reconstruction, en les aidant à planifier à partir de leurs compétences et de leurs capacités, et pas seulement à partir des connaissances acquises.
La ville de Santo André a reçu près de 700 réfugiés d’Haïti. Comment travaillez-vous l’inclusion sociale de ces personnes ?
Depuis 2013, en effet, la Mairie de Santo André a agi de manière matricielle, en articulant différents services et départements, tels que ceux de la Santé, de l’Éducation, des Droits de l’Homme, du Travail et de l’Assistance sociale. Grâce au Département d’Inclusion et d’Assistance sociale, nous avons travaillé, au travers du Programme national d’accès à la formation technique et à l’emploi (PRONATEC), de cours de langue portugaise et de formation professionnelle, ainsi que de l’inclusion des familles et des individus dans les programmes de transfert de revenu et de protection sociale spéciale, comme ceux qui sont offerts par le Centre de référence spécialisé d’assistance sociale (CREAS), en cas de violation des droits.
Les jeunes constituent 25 % de la population de Santo André. Il s’agit d’une population très diversifiée. Comment parvenez-vous à incorporer la voix des jeunes dans la conception des actions de gouvernement destinées à cette tranche d’âge ?
Nous promouvons des actions dans des espaces publics en impliquant les enfants et les adolescents comme, par exemple, « L’Acte de l’Enfance et de l’Adolescence dans la Tour de la Paix », à laquelle participent des enfants de la Fédération des Organismes d’Assistance de Santo André (FEASA) avec la collaboration du Forum de Santo André des Droits de l’Homme et de la Culture de la Paix. Cet acte en faveur d’une culture de la paix dans la municipalité est composé de diverses interventions réalisées par les usagers, garçons et filles, provenant des organismes d’assistance sociale de la ville. Il se tient le 2 octobre de chaque année, qui est, comme vous le savez, le Jour international de la Culture de la Paix ainsi que la date de naissance de Mahatma Gandhi.
Comment développez-vous la culture de la paix dans votre ville ?
La Direction des Droits humains et de la Culture de la Paix impulse dans la ville l’innovation d’un gouvernement préoccupé par le respect du citoyen et de la citoyenne, et de leur dignité, et garantit la réflexion ainsi que la transformation de la réalité actuelle.
Consolider cette Direction nous permet, en plus de la réflexion, d’implanter de manière graduelle des actions visant à évoluer d’une culture de la violence, dans divers domaines d’action, vers une culture de la paix. La garantie de la paix va bien au-delà des accords politiques, économiques ou militaires ; elle dépend, en effet, de l’engagement unanime, sincère et continu des individus. La Division des Humanités de ce Département, impliqué dans le mouvement de construction de la paix, promeut le bien-être des citoyens et des citoyennes ainsi que le développement humain, et cela au travers du développement de certaines attitudes individuelles et collectives.
Le défi consiste à doter les enfants et les adultes de la compréhension des principes et du respect de la liberté, de la justice, de la démocratie, des droits de l’homme, de la tolérance, de l’égalité et de la solidarité. Cela implique le rejet clair de toute manifestation de violence. La Division des Humanités gère les conflits qui se produisent dans la ville et promeut l’éthique comme principe pour la restitution de la dignité humaine. Les actions sont destinées à éveiller les expressions d’amour et de respect qui semblent s’être endormies ces derniers temps. L’agenda comprend, depuis 2013, les Cercles constructeurs de la Paix réalisés dans les institutions, le CRAS, le CIPAS, les universités ainsi que d’autres espaces ; et le Projet de Développement démocratique et de Culture de la Convivance, qui consiste à former des agents multiplicateurs au moyen de la formation des leaders populaires et des citoyens et des citoyennes. La Division organise des actions ponctuelles telles que la formation de leaders au Théâtre de l’Opprimé, des conférences sur le trafic humain, des cercles de femmes, des cercles de rencontres masculins ainsi que d’autres activités sur les droits de l’homme, toujours de manière transversale avec le Département de l’Éducation ainsi que d’autres départements impliqués dans ces thématiques.
La population « âgée » de Santo André représente 13 %. Quels services la Mairie offre-t-elle à ces personnes ?
En plus des politiques développées par d’autres départements tels que ceux de la Santé et de l’Éducation, le Département d’Inclusion et d’Assistance sociale offre des espaces de convivance, comme le Centre de référence des personnes âgées de Santo André (CRISA), dont l’objectif est de rendre possible l’amélioration de la qualité de vie pour les personnes des troisième et quatrième âges, augmenter l’estime de soi, renforcer les liens familiaux et communautaires, et prévenir l’isolement social au moyen d’activités de convivance, ludiques, sportives, culturelles, d’inclusion digitale et d’intégration familiale qui permettent une vieillesse saine ainsi que la défense des droits de ces personnes. On reçoit environ 700 personnes chaque semaine, que ce soit au siège ou dans les 32 groupes repartis dans la ville. Le Centre de Jour des Personnes âgées est en cours de construction ; ce sera un espace de convivance visant à recevoir les personnes âgées durant toute la journée, en offrant des activités socioéducatives mais aussi en évitant leur institutionnalisation afin de ne pas les priver de la convivance quotidienne avec leurs familles.
D’autre part, le Centre de référence spécialisé d’assistance sociale (CREAS) est responsable de l’attention, de l’accompagnement et de l’adoption des mesures nécessaires en cas de violation des droits de ce groupe social, comme la violence contre les personnes âgées, l’abandon ou la négligence. En plus de recevoir des plaintes et de réaliser les démarches opportunes, les techniciens des CREAS orientent sur les droits des personnes âgées, en développant des actions et en articulant un réseau d’attention, qui comprend la défense publique et un service d’accueil institutionnel de ces personnes. Les plaintes sont reçues soit en venant au centre directement soit en téléphonant, ou bien encore par dérivation de professionnels d’autres institutions.
Photos: Júlio Bastos et Diego Alves
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